ESSAI
Chaque jour à Gaza, les deux plus grands espoirs sont de rester en vie et de ne pas entendre parler d’une autre perte dévastatrice.
Deir el-Balah, Gaza – Bienvenue à Gaza, un endroit où chaque appel téléphonique annonce la mort d’une personne, chaque message évoque la destruction de la maison d’un ami et chaque frappe aérienne envoie des tremblements de peur dans votre cœur.
Dans ce pays, la « maison » n’est plus un sanctuaire pour vivre et se détendre ; c’est une existence précaire, sujette à une dévastation soudaine et sans avertissement.
Le plus grand espoir auquel on s’accroche est simplement de rester en vie avec sa famille, d’éviter la perte déchirante d’un être cher ou d’affronter une disparition collective.
Considérez les familles effacées de l’état civil, effacées ensemble. À première vue, cela ressemble à une catastrophe, mais à y regarder de plus près, cela ressemble à une conclusion tragique et miséricordieuse sous les bombardements incessants.
Personne n’est laissé en deuil. Et d’une certaine manière, certaines personnes envient ceux qui ont trouvé une fin pacifique, échappant à la folie continue des bombardements et des tueries.
En parcourant l’actualité – dans les rares occasions où il y a accès à Internet – et en étant témoin du chaos entourant les camions d’aide entrant à Gaza, on ne peut s’empêcher de trouver les priorités du monde déroutantes.
Plutôt que de se concentrer sur les efforts visant à mettre fin à la guerre, l’accent semble être mis sur l’acheminement de l’aide.
Ce dont la population de Gaza a besoin encore plus que de la nourriture, de l’eau ou d’autres formes d’assistance, c’est la fin de la violence insensée, de l’effusion de sang et de la destruction. Ils réclament l’arrêt de la guerre.
Nous sommes maintenant au 18e jour et depuis trois jours, je ne peux pas partager ces notes dans mon agenda à cause du manque d’accès à Internet. Pourtant, malgré le passage du temps, rien ne change de manière significative. Gaza reste prisonnière du cycle répétitif de mort et de dévastation auquel le monde s’est habitué.
Mort après mort
Hier, nous avons appris la déchirante nouvelle du décès de journaliste Roshdi Sarraj, un cher ami. Le choc de sa perte était difficile à accepter. Les pensées se tournaient vers sa femme, Shorouq, un autre ami, et leur fille d’un an, Dania.
La veille, mes sœurs et moi avons appris une nouvelle encore plus dévastatrice : les neuf membres de la famille d’un ami avaient été tués. Cette famille comprenait la mère, Nibal, et ses filles : Saja, Doha, Sana, Mariyam et Lana, ainsi que son fils Mohammed. Ils ont péri après que les ordres israéliens de quitter Gaza les ont envoyés chez leurs proches à Deir el-Balah. Seule Noor, une fille mariée au Qatar, a survécu à cette tragédie.
Le cycle constant de l’actualité offre peu de répit pour gérer l’angoisse de perdre des êtres chers et les pleurer correctement.
La voix en larmes de Noor au téléphone depuis Doha, nous suppliant de prendre des photos de sa famille déjà enterrée en silence, évoquait les mots du poète palestinien Mahmoud Darwish : « La mort ne fait pas de mal aux morts, elle ne fait que blesser les vivants. »
